samedi 7 décembre 2013



En Alabama

                        Plus de 50 espèces indigènes à protéger

                                                                                                             par Viateur Boutot


L'État d'Alabama compte 54 orchidées indigènes réparties entre les collines de Huntsville et les tourbières du delta de Mobile-Tensaw1. Ces espèces sont fragiles et elles tolèrent mal les changements touchant leur milieu. La plupart ne survivent que dans des habitats non perturbés.

L'Alabama est l'un des États américains qui compte le plus grand nombre d'orchidées avec des espèces allant de plantes de grande taille comme Calopogon tuberosus à des plantes de faible hauteur comme Spiranthes odorata. L'aire de répartition d'autres espèces, présentes dans des États voisins, inclut l'Alabama : c'est le cas de Pogonia ophioglossoides, Habenaria quinqueseta, Ponthieva racemosa et Goodyera pubescens.

La plupart des orchidées de l'Alabama sont terrestres. Parmi celles-ci, Calopogon tuberosus qui fleurit en début d'été et qui porte des fleurs de plus grandes dimensions que celles d'autres espèces, les tépales de cette orchidée pouvant atteindre 2,5 cm.

Une espèce épiphyte, Epidendrum conopseum, croît au sommet de chênes, habituellement au milieu de plantes de la fougère épiphyte Pleopeltis polypodioides.

Au passage des années, toutes les orchidées de l'Alabama deviennent de plus en plus rares. Ainsi, si on trouve encore des populations de Cypripedium acaule dans la plupart des tourbières de l'État, ce n'est qu'exceptionnellement que Platanthera blephariglottis var. conspicua et Platanthera ciliaris sont présentes dans ces mêmes habitats.


Platanthera blephariglottis var. conspicua



Source :
http://imgick.al.com/home/bamamedia/pgfull/img/alphotos/photo/2013/10/-0f9c273190ab2fd0.jpg

Pouvant atteindre près d'un mètre de hauteur, Platanthera blephariglottis var. conspicua fleurit entre juillet et septembre. Ses inflorescences présentent habituellement au moins une vingtaine de fleurs.


Le botaniste Fred Nation souligne que des données de collecte indiquaient, il y a à peine quelques années, la présence de cinq populations de l'espèce en Alabama. Or, après avoir effectué un inventaire des plantes de Platanthera blephariglottis var. conspicua qui était autrefois commune en Alabama, des scientifiques en arrivent à la conclusion que, maintenant, cette orchidée n'est plus présente que dans un champ de 3 acres (un peu plus de 1,21 hectare), dans le comté de Baldwin, au sud de l'État. Cette réduction progressive de l'espace occupé par l'espèce démontre la situation préoccupante des orchidées de l'Alabama.

Les Hommes de la tourbière' [bog men], surnom autoproclamé d'un groupe informel de biologistes, la plupart à la retraite, veillent à la conservation de Platanthera blephariglottis var. conspicua.2

 'Feu, feu, joli feu, ton ardeur nous réjouit'

Plusieurs des espèces de l'Alabama sont des 'fidèles du feu', fleurissant abondamment dans les habitats où surviennent régulièrement des incendies mais disparaissant en l'absence de ceux-ci. La présence de Platanthera blephariglottis var. conspicua dans l'espace limité du champ du comté de Baldwin illustre le rôle que le cycle du feu jouait autrefois dans les forêts et les prairies.

Lorsque la petite tourbière située près de la Fish River, dans le comté de Baldwin, a été léguée à la Weeks Bay Foundation, il y a une dizaine d'années, les botanistes ont été surpris de voir apparaître quelques plantes de Platanthera blephariglottis var. conspicua, à la fin du mois d'août. La première année, il y en avait 20.

L'année suivante, après qu'un incendie ait été allumé au milieu de l'hiver pour éliminer plusieurs plantes ligneuses de la tourbière qui avaient atteint une grande taille, ce sont 40 plantes de l'orchidée qui sont apparues. Le feu de l'année suivante a été suivi de la floraison de 80 plantes de l'espèce. Ainsi, d'année en année, la population de Platanthera blephariglottis var. conspicua s'est accrue progressivement pour atteindre 1 200 plantes en 2013, parfois groupées par douzaines.

Un ex-employé de l'Alabama Forestry Commission, Patrick Waldrop, indique que si les orchidées ont bien répondu aux feux dans la tourbière, les connaissances sur l'écologie des orchidées demeurent toutefois limitées. Son groupe de biologistes se demande notamment à quelle fréquence il conviendrait d'allumer un incendie dans la tourbière et quel niveau de chaleur devrait être atteint pour que le feu contribue le mieux au cycle de reproduction des orchidées.

Abordant un autre aspect des menaces pesant sur les populations d'orchidées de l'Alabama, Fred Nation signale que la transplantation d'espèces indigènes est une entreprise vouée à l'échec. Il estime que 95 à 100 pour cent des espèces transplantées mourront parce que leur survie et leur développement sont intimement liés aux conditions qui prévalent dans leur habitat.
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     2 Voir, en plus des photos illustrant cet article, celles qui figurent sur les pages web défilant à partir du lien suivant : http://photos.al.com/4558/gallery/orchid_gallery_/index.html#/0





À Miami, en Floride

Réintroduction d'espèces indigènes en milieu urbain

                                                                par Viateur Boutot


Le Jardin botanique tropical Fairchild (Fairchild Tropical Botanic Garden) a entrepris de réintroduire des espèces d'orchidées indigènes de Floride dans la ville de Miami1.

Des étudiants de l'école secondaire TERRA Environmental Research Institute cultiveront pendant deux ans les orchidées qui seront ensuite intégrées aux paysages urbains de Miami.

Avant que des établissements humains n'envahissent le sud de la Floride, chênes et acajous étaient hôtes d'orchidées. Toutefois, dès la fin du XIXe siècle, de nombreuses plantes d'orchidées étaient collectées et expédiées vers le Nord pour y être vendues.

Constatant que les espèces de Floride se font de plus en plus rares dans leur milieu traditionnel, des botanistes ont résolu de contribuer au retour des orchidées. Dans ce but, le Jardin botanique Fairchild s'est inspiré d'une initiative entreprise il y a une trentaine d'années par une institution parente, le Jardin botanique de Singapour.

La réalisation du projet de réintroduction d'espèces indigènes de Floride à Miami est en cours. En octobre, les premiers plantules en flacon de deux espèces — Encyclia tampensis et Cyrtopodium punctatum — ont été confiés aux soins d'élèves de l'école secondaire. Les jeunes plantes sont extraites des flacons et cultivées dans la serre de l'école. Une fois qu'elles auront atteint une taille suffisante, les orchidées seront attachées à des chênes situés aux abords de l'école.


Source:

La direction de l'institution d'enseignement propose aux élèves de réaliser des projets de recherche visant notamment à évaluer différents substrats utilisés pour la culture d'orchidées et les effets de la durée de l'exposition à la lumière sur les espèces qu'ils cultivent.

En vue de la réintroduction des orchidées indigènes dans des espaces sous juridiction de l'État ou du gouvernement fédéral, le Jardin botanique Fairchild a identifié des arbres-hôtes ayant le potentiel de favoriser l'établissement des orchidées le long de voies de circulation et dans des espaces publics de Miami de même que dans des cours d'écoles.

Les initiateurs du projet de réintroduction d'orchidées indigènes de la Floride à Miami espèrent que les citadins pourront, dans quatre ou cinq ans, voir des fleurs d'orchidées un peu partout dans une des villes les plus achalandées des États-Unis.
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Conservation en Virginie

Une collaboration entre des scientifiques et le public

                                                                                                                          par Viateur Boutot

À l'Environmental Research Center de l'institution de recherche scientifique Smithsonian, le botaniste Dennis Whigham se consacre à l'étude des orchidées indigènes d'Amérique du Nord. Il y dirige l'équipe de chercheurs du Laboratoire d'écologie des plantes1. Leurs recherches portent sur les quelque 230 espèces d'orchidées du Canada et des États-Unis, y compris Isotria medeoloides qui, sur le territoire américain, a le statut d'espèce menacée.


Dans la partie de la Virginie appelée Historic Triangle, région des premiers établissements européens, on trouve plusieurs populations d'Isotria medeoloides. Il s'agit de l'orchidée la plus rare à l'est du Mississippi.

Donna Ware, professeure de biologie au College of William and Mary de Williamsburg, a effectué des recherches sur l'espèce dans les années 1980 et 1990. À partir des données de répartition recueillies par cette scientifique, grâce à une subvention obtenue du National Park Service, sous la direction de Whigham, des chercheurs étudient des colonies de cette orchidée dans le Prince William Forest Park et sur la base militaire Fort A.P. Hill.

Source :




















Les plantes de l'espèce visibles à la surface du sol, une fois leur croissance terminée, auront par la suite une période de dormance pouvant dépasser une vingtaine d'années. Les scientifiques n'ont pas encore réussi à établir si ces plantes meurent ou s'il s'agit véritablement d'une dormance.

Les populations d'autres espèces présentes dans la même région, notamment des orchidées du genre Cypripedium ou Tipularia discolor, semblent prospères mais Whigham considère que toutes les orchidées sont, du point de vue de l'écologie, des 'canaris dans la mine' dont la survie est menacée par l'exploitation commerciale, la collecte excessive et la destruction des habitats.

Les efforts de Whigham pour la conservation des espèces d'orchidées prennent maintenant la forme d'un profond engagement au sein du North American Orchid Conservation Center (NAOCC)2. Le scientifique espère que ce nouveau centre — créé par la Smithsonian Institution et le Jardin botanique des États-Unis (United States Botanic Garden) — permettra de conjuguer les efforts publics et privés pour protéger et réintroduire des orchidées indigènes..


Ainsi, dans la région de Middle Peninsula, sur la rive occidentale de la baie de Chesapeake, des membres de la Virginia Native Plant Society collaborent déjà avec des chercheurs d'institutions fédérales, leur fournissant des plantes et des graines pour analyse moléculaire. De plus, les amateurs d'orchidées sont invités à noter et à partager leurs observations sur les populations d'espèces indigènes. Le NAOCC compte également sur les membres d'organisations locales pour la conduite de projets éducatifs. Dans ce but, notamment, un site web, Go Orchids3, vient d'être mis en ligne afin d'aider les orchidophiles à identifier les espèces qu'ils découvrent.

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2 northamericanorchidcenter.org (attention : possible erreur de lecture sur le site)


    3              http://oorchids.northamericanorchidcenter.org/